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Pollo Mundo
29 avril 2020

Le sport au collège - journal de confinement 40

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Au collège, j'ai commencé à grossir et à me désintérresser des activités physiques. Pendant les cours de sport, j'étais toujours choisi en dernier. Au début, on me mettait dans les cages, mais c'était une erreur. Quand je voyais un attaquant foncer vers moi avec quelque-chose de malade dans le regard, je prenais un moment pour me demander ce que je faisais là, puis je sortais des cages pour laisser le champ libre au tireur. 

Au début j'étais comme tout le monde, plein de bonne volonté, mais les trois buts que j'avais arrêté m'avaient convaincu que se jeter sur un ballon à toute vitesse était une idiotie qui pouvait me faire mal. On m'a sorti des cages et on m'a mis sur le terrain. Fx, un sacré chenapan, m'a appris à faire une faute intentionelle et discrète. On courrait ensemble côte à côte et il me disait : Tu vois, là on court à la même vitesse, je te mets juste un petit coup d'épaule, et hop, tu tombes par terre, ni vu ni connu !

Ils ont essayé de me mettre en attaque mais rien à faire. Je pouvais à peine courir avec un ballon dans les pieds, alors ne parlons même pas de le prendre à quelqu'un ou de le garder quand quelqu'un le voulait. Par contre, j'aimais bien déraper pour faire des tacles. Ça demandait moins d'adresse et c'était plus marrant. Il fallait juste s'élancer par terre et glisser sur l'herbe en visant à peu près juste. On a fini par me réserver une place en défense, mais j'étais quand même choisi en dernier.

Ce que je détestais encore plus que le foot, c'était le cross.

J'ai toujours ressenti de violentes douleurs dans la poitrine en courant, mes poumons ne s'échauffent pas simplement, et aujourd'hui encore. De plus, je n'avais aucune résistance mentale, dès que la douleur de l'effort arrivait, c'était comme si mon corps entrait dans un état de panique. Je perdais mon souffle et j'étais couvert de sueur en dix minutes. En cinquième, je suis arrivé bon dernier au cross intercollège. Mon manque de préparation physique avait rencontré mon sens de l'orientation désastreux, qui m'a fait courir dans le mauvais sens dix bonnes minutes avant qu'un prof me remarque. J'étais loin derrière tout le monde, alors je ne voyais pas dans quelle direction avancer.

L'année suivante, connaissant le parcours, j'ai pris plein de raccourcis. Il était hors de question de rejouer cette partie à la loyale. Je suis arrivé quatrième en partant de la fin. 

Au judo, mon sens de l'équilibre brillait par son absence, si bien qu'on me faisait tomber très facilement. Mon poids me permettait d'entraîner au sol mes adversaires, mais je n'avais aucun sens de ce qu'il fallait faire ensuite. Aucune intelligence spatiale. Rapidement, mon adversaire était derrière moi, bloquait mes jambes avec les siennes et m'étranglait. Bonne ambiance.

À l'époque, je faisais des crises de boulimie nocturne fréquentes. Je me relevais la nuit, et j'allais descendre un saucisson, un paquet de gateaux, un pot de nutella. En conséquence, je grossissais de plus en plus. Dans les vestiaires, je voyais tous les gars de la classe avec des abdos et des pectoraux, j'étais le seul avec du bide et des seins. Le sport me dégoutait car il me renvoyait à mon propre dégout de moi-même, qui s'exprimait, se justifiait, et se renforçait par la boulimie. 

Si ce que j'ai décrit résonne une corde en vous, si vous vous débattez avec des troubles alimentaires et que votre corps vous est, dans une grande mesure, complètement étranger,  je peux vous dire ceci :

Le sport n'est pas ce que vous avez vécu au collège. C'est juste une chose qui vous fera du bien. Il y en a d'autres. L'essentiel, c'est de vous faire du bien, quitte à vous forcer un peu, au début. Ça peut être tout simple, manger une pomme tous les jours, aller courir dix minutes, se mettre à la couture, au dessin, à la lecture. Cette habitude ne changera pas grand-chose, mais elle prendra quelques kilos de vos épaules. C'est toujours bon à prendre, quand le corps et la vie deviennent lourds à porter.

C'est tout. Il n'y a pas de prix à la fin, pas d'applaudissements, pas de belle sortie. pas d'autre récompense que d'être capable d'endurer ce que la vie s'apprête à vous offrir, et d'aider, comme vous le pouvez, ceux autour de vous. Le monde s'assèche, il devient dur. C'est à nous, maintenant, de devenir fort, souples et bienveillants, pour endurer les temps à venir, et relever ceux qui tombent.

On ne laisse personne derrière.

À demain.

 

 

 

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